Mon travail explore une tension émotionnelle profonde, entre absence et réminiscence, influencée par les théories de la construction psychique de l’enfance ou par la Saudade – ce sentiment portugais mêlant nostalgie, désir et mélancolie, une sensation insaisissable qui teinte mes œuvres d’une dualité entre attraction et distance, présence et effacement. À travers la peinture, je questionne la perméabilité entre mémoire et imaginaire, entre souvenirs recomposés et réalités altérées, cherchant à donner forme aux instants flous qui persistent en nous.
L’espace domestique de mon enfance, saturé d’objets accumulés, a profondément marqué ma perception de l’environnement et de la forme. Ce chaos structuré a influencé ma manière d’aborder l’image : superpositions, juxtapositions et couches successives traduisent une tentative d’excavation de la mémoire, où chaque ajout ou effacement devient un geste d’archéologie intime. Ce dialogue entre accumulation et disparition est au cœur de ma pratique, où le souvenir se reconstruit qu’en se déconstruisant.
Si des artistes comme Hervé Télémaque, Philip Guston ou Michel Majerus m’inspirent par leur usage de la source et leur manière de la donner à voir, ce sont avant tout les codes populaires et générationnels qui nourrissent mon langage pictural. J’explore un lexique visuel issu du numérique, du graphisme et de la culture visuelle contemporaine. Mon travail est imprégné d’un imaginaire collectif, oscillant entre esthétique de la consommation, traces du virtuel et fragments d’une mémoire individuelle recomposée.
Un élément clé de cette quête est le jeu vidéo, hérité dans mon enfance et devenu un prisme fondamental dans mon approche de l’image. Cet espace immatériel, à la fois familier et insaisissable, interroge notre rapport à la réalité et à la fiction. À travers lui, je mets en tension les espaces virtuels, réels et mémoriels, interrogeant la manière dont ces dimensions s’interpénètrent et influencent notre perception du monde. La peinture devient alors un terrain de jeu où je compose des espaces hybrides, entre immersion et rupture, contemplation et saturation.
Ainsi, mes œuvres fonctionnent comme des constructions fragmentaires où la peinture devient un territoire de dialogue entre passé et présent, matérialité et fugacité. En jouant sur l’accumulation, la structure et l’effacement, j’explore l’absence et la quête de sens à travers un langage visuel oscillant entre figuration et abstraction, narration et éclatement. Chaque composition est un territoire mouvant, un équilibre instable où la mémoire se transforme et se redéfinit sans cesse.